Silba adipata McAlpine

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Auteur : François DROUET
Photographies : François DROUET

(sauf indications)
Tous droits réservés 

 

 

Ramassage prophylactique des figues attaquées

 

 

 

Il s'agit du ramassage des figues attaquées, encore sur l'arbre ou tombées au sol. L'objectif étant d'empêcher la sortie des larves de Silba adipata McAlpine et de diminuer la multiplication des générations futures de mouches.

Selon le plan suivant : ramassage sur l'arbre des figues attaquées, ramassage des figues tombées au sol, interrogations sur les risques, éventualité de remise en cause.

 

RAMASSAGE SUR L'ARBRE DES FIGUES ATTAQUEES

 

En premier lieu, il faut éviter que les larves ne sortent des figues attaquées et ne chutent au sol.

Pour cela, je repère les figues commençant à présenter un début de changement de teinte (le plus souvent à l'apex de la figue, dans la région de l'ostiole) et je les ramasse, puis je les brûle.
 

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figue attaquée repérée (à ramasser sur l'arbre)

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figue attaquée repérée (à ramasser sur l'arbre)
(variété unifère 'Bellone')
 

Lorsqu'elles sont dépourvues de trous de sortie, ces figues contiennent les larves et c'est ainsi une partie de la nouvelle génération de mouches qui est éliminée.

Dans mon ramassage, j'inclus aussi les figues attaquées qui ont viré au rouge violacé, qui se distinguent nettement sur l'arbre.
 

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figue attaquée entièrement rouge violacé (à ramasser sur l'arbre)

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figue attaquée entièrement rouge violacé (à ramasser sur l'arbre)
 (variété unifère 'Bellone')
 

Elles présentent généralement des trous de sortie de larve, mais, pour certaines d'entre elles, toutes les larves ne sont pas sorties.

Et, dans certains cas, elles ne présentent pas de trous de sortie de larve. Leur élimination fait aussi partie de la prévention de la nouvelle génération de mouches.
 

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figues attaquées ramassées sur l'arbre (variété unifère 'Bellone')

Mouche noire du Figuier (Silba adipata McAlpine) : figues attaquées ramassées sur l'arbre (variété unifère 'Bellone')
(noter la diversité des colorations et des tailles)

 

Mouche noire du Figuier : intérieur des figues attaquées qui ont été ramassées sur l'arbre (variété unifère 'Bellone')

Mouche noire du Figuier : intérieur des figues attaquées qui ont été ramassées sur l'arbre (variété unifère' Bellone')
 

Certains utilisent comme moyen de détection sur l'arbre des figues attaquées l'apparition du premier trou de larve.

Selon mon expérience, il m’apparaît plus difficile de détecter sur l’arbre un trou de sortie de larve qu’une coloration rougeâtre, aussi partielle et légère soit-elle.

D’autre part, j’ai observé qu’au-delà des premiers jours d’attaques de la saison, propices aux pontes multiples dans la même figue et aux pontes de 3 larves par la même mouche, pendant l’essentiel de la saison ce sont des pontes à 1 seule larve qui prédominent. Ce qui rend en grande partie inefficient le ramassage des figues attaquées sur la base de la présence d’un trou de sortie de larve, prétendu le premier mais qui sera le seul.

Cette pratique doit donc être réservée aux figues immatures des variétés à peau claire à maturité, qui restent vertes après l'attaque de Silba adipata McAlpine.
 

Ramassage des figues iimmatures infestées par Silba adipata McAlpine

Ramassage des figues iimmatures infestées par Silba adipata McAlpine
Crédit : Fabian Cousinié (
CIVAMBIO 66)   

 

Ramassage des figues iimmatures infestées par Silba adipata McAlpine

Ramassage des figues iimmatures infestées par Silba adipata McAlpine
Crédit : Marie Singer (
CIVAMBIO 66

 

RAMASSAGE DES FIGUES TOMBEES AU SOL

 

En second lieu, je pratique le ramassage systématique des fruits attaqués tombés au sol et je les brûle.

Bien sûr, le fait que, dans la majorité des cas, les larves se soient laissées chuter avant que le fruit lui-même ne tombe limite la portée de cette pratique.

Mais, pour les figues au sol qui seraient encore pourvues de larves, c'est une partie supplémentaire de la future génération que je détruis...  

F. SILVESTRI préconise de ramasser les figues attaquées immatures ou mûres tombées au sol et de les détruire. Il indique toutefois que la mesure est d'intérêt limité car lorsque la figue chute au sol, le plus souvent une ou plusieurs larves l'ont déjà quittée.

Référence : SILVESTRI F., 1917, Sulla Lonchaea aristella Beck. (Diptera : Lonchaeidae) dannosa alle infiorescenze e fruttescenze del caprifico e del fico, Bollettino del Laboratorio di Zoologia Agraria in Portici, vol.12, pp. 123 -146.

Mais l'auteur n'évoque pas le ramassage sur l'arbre des figues attaquées, qui contribue à réduire la population de mouches noires du Figuier de façon plus significative que le ramassage des figues sur le sol (qu'il faut néanmoins pratiquer aussi).

Surtout si l'on s'attache à repérer les figues attaquées dès le tout premier symptôme de l'attaque, alors qu'elles ne présentent pas encore de trous de sortie de larve (donc qu'elles contiennent encore toutes les larves).

Il est vrai que le ramassage sur l'arbre est plus consommateur de main-d'oeuvre et qu'il nécessite que le figuier soit à une hauteur accessible (le cas échéant via une canne de Provence munie d'un crochet en fil de fer, selon la pratique traditionnelle pour rapprocher vers soi les branches souples de figuier).

La conduite et la taille des figuiers pour une récolte à partir du sol dans les vergers piétons d'aujourd'hui satisfont à cette exigence d'accessibilité, mais était-ce le cas en Italie en 1917 ?

Sur le même sujet, J. GHESQUIERE, en 1949, déplore que les agriculteurs ne ramassent pas les figues tombées au sol alors qu'il a été observé que le ramassage des fruits attaqués réduit de façon significative les dégâts de récolte.

Il préconise d'enfouir dans des tranchées les fruits tombés ou de les donner à manger au petit bétail et à la volaille.

Référence : GHESQUIERE J., 1949, La mouche noire des figues Lonchaea aristella Beck. à la Côte d'Azur, comptes rendus des séances de l'Académie d'agriculture de France, T. 35, pp. 650-653.

 

INTERROGATIONS SUR LES RISQUES

 

Lors de mes échanges avec des personnes pratiquant, ou préconisant aux producteurs, le ramassage prophylactique des figues attaquées, j'ai relevé deux interrogations liées au latex suintant en abondance des points d'attache des pédoncules des figues attaquées qui ont été ramassées.

Il s'agit de l'augmentation de l'attractivité du figuier et de l'augmentation de la capacité de ponte.

 

AUGMENTATION DE L'ATTRACTIVITE DU FIGUIER

Lorsque l'on ramasse sur l'arbre une figue dès l'apparition des symptômes d'attaque de Silba adipata McAlpine, le pédoncule n'est pas encore desséché et il s'ensuit un suintement de latex très important au niveau de celui-ci, mais également sur le rameau, au niveau du point d'attache du pédoncule.

J'observe souvent un individu de Silba adipata McAlpine se poser sur le point de suintement (dont l'attractivité est forte) et se mettre à consommer le latex.
 

Silba adipata McAlpine consommant du latex sur le point d'attache d'une figue immature enlevée

Silba adipata McAlpine consommant du latex sur le point d'attache d'une figue immature enlevée
(noter que le point de suintement de latex se trouve à l'aisselle de la feuille, où se trouvait la figue)
 

Ainsi, lors du ramassage des figues attaquées sur un figuier, on crée de nombreux points de suintement de latex et l'on peut se demander si ceux-ci ne renforcent pas l'attractivité du figuier pour les individus de Silba adipata McAlpine.

En particulier, on pourrait craindre dans un verger commercial que la multiplicité des figuiers porteurs de ces nombreux points exsudant du latex très attractif ne transforme la parcelle en un vaste pôle d'attraction pour les mouches noires du voisinage.

Bernard PEYRE, ancien producteur de figues et passionné de figuiers, m’a fait remarquer que le risque d'augmentation de l'attractivité du figuier pourrait tout autant procéder du latex exsudant des rameaux par suite de la taille en vert des figuiers (période de présence de Silba adipata McAlpine), pratiquée par certains producteurs. Et qu'il en est de même pour les éventuelles opérations d'éclaircissage des figues.

Selon mes trois observations qui suivent, je pense que le risque d'augmentation de l'attractivité du figuier lié aux points de suintements de latex n'existe pas, au moins pour un jardin d'amateur. Pour un verger commercial, il conviendra de vérifier si mes observations se trouvent confirmées.

Première observation.

Lorsque je ramasse sur l’arbre les premiers lots de figues attaquées de la saison, il s’agit de plusieurs dizaines de figues ayant viré au rouge dans la journée, donc avec latex frais au niveau du pédoncule.

Pourtant, malgré le nombre élevé de points de suintement important de latex que cela provoque, je ne constate pas un accroissement du nombre d’individus de Silba adipata-McAlpine sur l’arbre.

Ce nombre reste constant le jour même et aussi le jour suivant (1 à 3 individus dans l’arbre aux heures de fréquentation habituelle, rarement 4 et exceptionnellement 5 ou 6).

Lors de ces premières journées de ramassage, en dehors des heures de fréquentation habituelle du figuier (donc pendant plusieurs heures), aucun individu de Silba adipata McAlpine  n’est présent sur l’arbre malgré la multitude de points de suintement de latex frais.

Je fais le même constat pour tous les ramassages quotidiens de figues attaquées qui suivent, avec un nombre de figues concernées beaucoup moins important.

Deuxième observation.

Si je provoque deux points de suintement de latex en arrachant dans la zone de fréquentation habituelle du figuier deux feuilles situées sur des noeuds qui se suivent sur un rameau de l’année et que je badigeonne l’entre-noeud avec le latex frais exsudant de la base des pétioles arrachés, j’obtiens l’un des appâts les plus performants que je connaisse pour Silba adipata McAlpine.

Les mouches noires déjà sur le figuier se précipitent vivement sur l’appât ainsi confectionné, ou le font quelques minutes après.

Mais si aucune mouche noire n’est présente sur le figuier (par exemple, en dehors des heures de fréquentation habituelle), il m’arrive quasiment à chaque fois d’attendre trois à quatre heures avant d’en voir une se poser sur la zone appâtée avec le latex.

Je l’ai expérimenté plusieurs saisons, à tel point que, désormais, je ne cherche à observer les mouches noires qu’à leurs heures de fréquentation habituelle du figuier...

Cela montre que le pouvoir attractif du latex ne joue pas sur une longue distance et même joue sur une très courte distance.

L’attractivité du latex est très forte, mais uniquement pour les mouches noires déjà sur le figuier.

Troisième observation.

Je puis observer sur un figuier tout au long de la saison le nombre habituel de mouches noires présentes sur celui-ci (le plus souvent 3), indépendamment de la présence de latex suintant et même indépendamment de la présence de figues immatures de taille attaquable (en début de saison) ou de figues mûres (en fin de saison).

Et, en l’absence de toute figue sur le figuier, j’observe sur celui-ci en fin de saison et pendant quelques jours le nombre habituel d’individus de Silba adipata McAlpine, de façon constante.

 

Ces trois observations indiquent selon moi que Silba adipata McAlpine est attirée avant tout par le figuier (odeur, vue) et, subsidiairement, sur le figuier, de façon très forte par les points de suintement de latex qui peuvent s’y trouver.

Il en est de même pour d’autres points d’attraction alimentaire, telles une coulure de jus de figue sucré sur une feuille ou une figue mûre s’étant fendue, mais avec une attractivité moins marquée que pour le latex.

 

AUGMENTATION DE LA CAPACITE DE PONTE

La création de nombreux points de suintement de latex sur le figuier lors du ramassage prophylactique des figues attaquées pourrait permettre une consommation abondante de latex, qui aurait pour conséquence une augmentation significative de la fertilité (capacité de ponte) des mouches concernées.

Et, par voie de conséquence, un accroissement de leur nocivité par rapport à la récolte de figues.

Je ne dispose pas d’observations pouvant éclairer, même en partie, le point précité.

Mais, selon mon expérience, la présence du nombre habituel de mouches noires sur un figuier (généralement 3) suffit à engendrer une capacité de nuisance significative (20 à 80 % de pertes - voire plus, par exemple sur mon figuier unifère ‘Bellone’ : 90 à 95 %).

Ceci même si les mouches concernées n’ont pas de latex à disposition en quantité importante parce que je n’effectue pas de ramassage prophylactique dans la saison.

En conséquence, la consommation de latex en abondance, si elle venait à doper la capacité de ponte, ne pourrait être qu’un facteur aggravant, ce qui a d’autant moins de signification que le niveau des pertes est déjà élevé.

Bernard PEYRE, ancien producteur de figues et passionné de figuiers, m'a fait observer que le latex reste attractif pendant 2 à 3 jours mais que les plus grandes quantités sont consommées le soir qui suit l'enlèvement des figues attaquées. D'autre part, une grande part du latex émis sèche rapidement. 

ll émet la suggestion de réaliser le ramassage prophylactique des figues attaquées, ou d'exécuter la taille en vert, uniquement dans la matinée, vers 9-10 h (heures habituelles de fin de fréquentation du figuier par les mouches noires le matin), ce qui permettrait au latex de sécher avant la fin de l'après-midi (18-19 h, heures habituelles de début de fréquentation du figuier par les mouches noires le soir).

Ainsi, le risque de sur-nourrir les mouches serait moindre.

 

EVENTUALITE DE REMISE EN CAUSE

 

De nombreux producteurs de figues en mode d'agriculture biologique pratiquent le ramassage prophylactique des fruits attaqués, à notre époque où le coût de la main-d'oeuvre est pourtant un élément déterminant de la compétitivité commerciale.

Mais, parmi eux, certains s'interrogent sur l'utilité réelle de ce ramassage et même remettent en cause cette pratique.

Il se peut qu’ils aient raison.

Mais, selon moi, pas pour les raisons d’attractivité des pièges posés sur les figuiers qui attireraient les mouches noires sur la parcelle, ou d’attractivité des points de suintement de latex frais générés par le ramassage des figues attaquées, qui en feraient de même.

La raison pourrait être l’engendrement d’une capacité de nuisance significative par un très faible nombre d’individus de Silba adipata McAlpine présents en permanence sur chaque figuier (habituellement 3, pour prendre le cas général que je constate sur mes figuiers), couplé à l’aptitude de l’espèce à maintenir ce nombre constant malgré les captures (par un taux de remplacement idoine).

Si 3 individus suffisent à engendrer une très forte nuisance pour la récolte d’un figuier, et si, quel que soit le nombre d’individus dans la région, le nombre de 3 individus reste le même sur chaque figuier de façon permanente, à quoi sert de faire tomber de 10.000 possibles à 100 possibles le nombre d’individus de Silba adipata McAlpine pouvant coloniser le figuier, sachant qu’ils ne le feront pas....

Dans ce cas, la problématique revient à faire chuter le nombre global d’individus dans la région à un nombre inférieur à celui permettant, d’une part, la présence du nombre habituel d’individus de Silba adipata McAlpine sur le figuier et, d’autre part, le remplacement sur celui-ci des individus capturés.

La question est : avec un nombre d’individus habituellement présents sur le figuier aussi faible, cette problématique peut-elle être résolue ?

Et, de façon connexe, l’incidence du ramassage prophylactique des figues attaquées sur le nombre d’individus présents dans la région a-t-elle alors encore une utilité ?

En tout état de cause, en l'état actuel des observations, il est très difficile de trancher sur l'utilité réelle du ramassage prophylactique des figues attaquées.

En jardins ou vergers d'amateur, le principe de précaution nous orienterait à conserver cette pratique et à essayer de se forger une conviction par l'observation chiffrée des résultats d'une année sur l'autre sur une période assez longue, en alternant une année avec et une année sans le ramassage prophylactique.

Pour ma part, dans l'attente d'observations plus fines, je conserve la pratique du ramassage prophylactique (sur l'arbre) des figues attaquées.

Dans les vergers de production, il conviendrait que les agriculteurs disposent d'études chiffrées précises de l'impact réel du ramassage prophylactique des figues attaquées, ce qui n'est pas le cas à la date de rédaction du présent sous-chapitre (2019).

 

 

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