Silba adipata McAlpine

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Auteur : François DROUET.
Photographies / vidéos : François DROUET et Bernard PEYRE.

Tous droits réservés.

 

 

Pluralité de pontes dans une même figue

 

(observation des femelles pondeuses)

 

 

 

J'ai constaté la pluralité de pontes dans une même figue de femelles de Silba adipata McAlpine par des observations directes de celles-ci sur le figuier. Je rapporte ces observations dans le présent chapitre, selon le plan suivant : campagne d'observation des pontes (2020), une observation exceptionnelle, pourcentage de pontes multiples, problématique de la détection par la mouche des figues infestées.

Sachant que j'ai également déduit cette pluralité de pontes dans une même figue par l'observation des larves contenues dans la figue (voir chapitre), et par l'observation des œufs déposés sous les écailles ostilaires et/ou dans le canal ostiolaire (voir chapitre).

 

CAMPAGNE D'OBSERVATION DES PONTES (2020)

 

En 2020, j'ai décidé de mener une campagne d'observation des pontes de Silba adipata McAlpine sur une touffe de figuier de la variété unifère 'Bellone', préalablement effeuillée en partie ; voir les détails de la campagne (objectifs, dates, durée, modalités, dispositif d'observation, décompte des pontes) au chapitre "Campagne d'observation des pontes 2020".

Lors de cette campagne, j'ai pu observer 1282 pontes, et j'ai noté qu'au cours de sa séquence de pontes successives sur le même figuier (jusqu'à vingt figues, voir chapitre), la femelle pond de façon non négligeable dans des figues dans lesquelles ont pondu antérieurement d'autres femelles. Et il lui arrive aussi de pondre dans une figue dans laquelle elle-même a déjà pondu quelques minutes auparavant.

Ces observations confirment mes observations des années antérieures relatives à la présence dans les figues attaquées de larves de taille nettement différente (2 tailles différentes le plus souvent, et jusqu'à 3), rapportées au chapitre "Pluralité de pontes dans une même figue (observation des larves)".
 

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.
 

J'ai consigné au fil de l'eau sur mes fiches d'observation quotidiennes les occurrences de pluralité de pontes dans une même figue, en utilisant quatre procédés pour les détecter.

Premier procédé : j'ai dénombré facilement les cas de pluralité de pontes dans les figues étiquetées avec un numéro de ponte. En effet, pour étudier l'augmentation du diamètre de la figue immature entre la ponte et la chute au sol, j'avais pu étiqueter un lot témoin d'une quarantaine de figues attaquées (après les avoir repérées en brisant le pétiole de la feuille la plus proche, immédiatement après la ponte).

Deuxième procédé : au cours de la séquence de pontes successives de certaines femelles, j'ai pu repérer des figues dans lesquelles la femelle avait déjà pondu au cours de la séquence.

Troisième procédé : il m'est arrivé de détecter les pontes multiples dans des figues situées à des positions qui m'étaient devenues familières depuis les postes d'observation (après plusieurs heures d'observation...), et pour lesquelles je me souvenais d'une ponte antérieure.

Quatrième procédé : pour certaines figues immatures toujours entièrement vertes, j'ai pu repérer l'infestation par une ponte antérieure en remarquant que l'ostiole dans lequel la femelle pondait avait l'aspect caractéristique d'un ostiole attaqué par les fourmis (à la suite d'une détection d'œufs de Silba adipata McAlpine par celles-ci). Il s'agit d'un ostiole présentant une zone blanchâtre au centre, par suite du déchiquetage par les fourmis des écailles rougeâtres de surface (voir chapitre relatif à l'extraction des œufs par les fourmis).

J'ai aussi essayé de prendre en compte la présence de traces de couleur rouge violacé sur la figue immature pour laquelle j'observais une ponte, qui indiquait que la figue était déjà infestée. Mais j'ai remarqué que Silba adipata McAlpine n'attaque pas les figues immatures infestées qui ont rougi, peut-être parce que celles-ci ne plus paraissent pas être des figues immatures. De toute façon, il ne m'aurait pas été possible d'utiliser ce procédé car j'ai observé que les premières traces de couleur rouge violacé sur figues immatures infestées ne commencent à apparaître qu'au moins 10 jours après la première oviposition dans la figue. Ce délai est trop long, pour une grande partie des figues attaquées, par rapport à la relative brièveté de la phase des attaques intenses sur le figuier de la variéré 'Bellone' (voir modèle général d'attaque de Silba adipata McAlpine, exposé dans un chapitre spécifique).

Il est important de noter que la pluralité de pontes dans une même figue constitue un facteur d'atténuation de la nuisance individuelle de la mouche : le nombre de nouvelles figues perdues pour la récolte lors de la séquence de pontes successives d'une femelle sur le même figuier est égal au nombre total de pontes moins le nombre de pontes sur figues déjà infestées.

Etant précisé que ce facteur d'atténuation n'existe que très partiellement pour la première séquence de pontes de la saison, par nature exempte de figues infestées par des pontes antérieures (seules les figues qui font l'objet de pontes multiples au cours de cette première séquence entrent en considération...). 

 

UNE OBSERVATION EXCEPTIONNELLE

 

OBSERVATION

Bernard PEYRE, ancien producteur de figues et consultant-formateur pour la culture commerciale de la figue, m'a fait part d'une observation exceptionnelle témoignant de la pluralité de pontes de Silba adipata McAlpine dans une même figue.

Le 22 septembre 2020, vers 19 h, par temps de giboulées, sur l'un de ses figuiers en pot : deux femelles se sont posées simultanément sur une même figue immature et ont entrepris de pondre ensemble dans l'ostiole de celle-ci. Les deux pontes simultanées ont duré environ 4 minutes, et les deux femelles ont pu réaliser chacune leur séquence d'allers-retours au-dessus de l'ostiole et de dépôts d'œufs..
 

Silba adipata McAlpine : pontes simultanées de deux femelles dans l'ostiole d'une même figue immature

Silba adipata McAlpine : pontes simultanées de deux femelles dans l'ostiole d'une même figue immature.
Crédit : Bernard PEYRE.
 

A ma connaissance, à la date de communication de l'information par Bernard PEYRE (22 septembre 2020), il s'agit d'une observation inédite.

Pour ma part, en observant les pontes de Silba adipata McAlpine, j'ai seulement vu (une fois) un individu de l'espèce se poser 2 secondes à proximité d'une femelle en train de pondre dans l'ostiole, puis s'envoler. Et, une seule fois aussi, un individu de l'espèce effectuer un rebond sur le côté (en partie haute) d'une figue dans l'ostiole de laquelle une femelle était en train de pondre (par "rebond", j'entends : arrivée en vol rapide, touche des pattes sur la surface de la figue sans se poser et éloignement immédiat).

 

VIDÉO D'ILLUSTRATION

Bernard PEYRE m'a adressé la vidéo ci-après pour illustrer son observation.

 

Silba adipata McAlpine : pontes simultanées de deux femelles dans l'ostiole d'une même figue immature.
Crédit : Bernard PEYRE.

 

L'analyse de la vidéo, d'une durée équivalente à un tiers du temps décompté pour les pontes simultanées, permet d'apprécier plus finement le comportement des deux mouches.

Pour faciliter l'analyse, il vaut mieux observer séparément (donc successivement) le comportement de chacune des mouches.

Au démarrage de la vidéo, la mouche du bas est en train de pondre dans l'ostiole, tandis que celle du haut se trouve hors de l'ostiole, sur le bord du sommet de la figue.
 

Comportement de la mouche du haut : deux séquences de ponte.

Première séquence de ponte.

La mouche se dirige vers l'ostiole, le traverse et entreprend une oviposition assez longue sous une écaille ostiolaire. Peu avant la fin de l'oviposition, la mouche se déplace légèrement vers la droite. Elle dégage ensuite son ovipositeur de l'ostiole et s'éloigne légèrement (fin de la première séquence de ponte).

La mouche se livre alors à un lissage des pattes arrière de courte durée.

Deuxième séquence de ponte.

La mouche effectue un retournement quasi-complet sur elle-même (près de 180 °) sur sa gauche et initialise une traversée de l'ostiole en se plaçant à l'arrière de l'autre mouche, sous les ailes, comme pour la pousser. Elle contourne celle-ci par la droite pour terminer sa traversée de l'ostiole et entreprendre une oviposition.  Au cours de l'oviposition,  elle se livre à des repoussements de l'autre mouche à l'aide de ses seconde et troisième pattes du côté gauche (l'autre mouche en faisant de même sur son côté droit). La mouche se déplace ensuite progressivement vers la droite sans que l'ovipositeur ne quitte l'ostiole. Puis elle dégage son ovipositeur de l'ostiole (fin de la deuxième séquence de ponte) et s'éloigne légèrement.

La mouche se livre alors à un lissage des pattes de l'arrière et des ailes (en cours lorsque la vidéo s'interrompt).
 

Comportement de la mouche du bas.

Après quelques poussées pour terminer l'oviposition en cours lorsque la vidéo débute, la mouche s'écarte de l'ostiole en pivotant sur sa gauche et s'éloigne légèrement. Elle réalise alors un retournement complet sur elle-même (180 °) sur sa droite, contourne par l'arrière l'autre mouche, traverse l'ostiole et entreprend une oviposition. Pendant l'oviposition, elle pivote légèrement sur sa gauche sans que l'ovipositeur ne sorte de l'ostiole.

Puis, tout en poursuivant l'oviposition, elle repousse l'autre mouche en écartant ses ailes à l'horizontale ou à l'aide de ses pattes du côté droit. L'oviposition dure longtemps et est toujours en cours au moment où la vidéo se termine, la mouche ayant alors les ailes ouvertes à 45 ° pour empêcher l'autre mouche de s'approcher.
 

Remarques.

La décomposition de la ponte d'une femelle de Silba adipata McAlpine en plusieurs séquences successives est habituelle ; voir chapitre "Ponte (oviposition)". Et il est également habituel que deux individus de Silba adipata McAlpine se  trouvant à proche proximité l'un de l'autre se livrent à des repoussements mutuels ; voir chapitre "Repoussement mutuel".

 

POURCENTAGE DE PONTES MULTIPLES DANS UNE MÊME FIGUE

 

VALEUR PLAFOND

J'ai examiné attentivement les relevés d'observations journaliers réalisés au cours de la campagne d'observation des pontes 2020. J'ai noté une journée pour laquelle j'ai pu repérer une proportion de pontes dans des  figues déjà infestées particulièrement forte : le 6 juin (12 figues déjà infestées sur 29 attaquées, soit 41 %). A contrario, le 3 juin, je n'ai pu repérer que 2 figues déjà infestées sur 31 figues attaquées (6 %). Pour les autres journées, les proportions des figues déjà infestées que j'ai pu repérer parmi les figues attaquées (pontes) sont les suivantes : pour les 5, 10 et 11 juin (nombre de pontes variant de 3 à 8) :  25 à 30 % ; pour les 7, 8 et 16 juin (nombres de pontes variant de 10 à 19) : 10 à 15 % ; pour les 9, 14, 15 et 17 juin (nombre de pontes variant de 2 à 8) : 0 %. Sachant que le 2 juin, premier jour de la période des pontes, il n'existait aucune figue déjà infestée, et que, le 13 juin, j'ai constaté plusieurs pontes dans des figues déjà infestées mais je n'ai pas pu en consigner le nombre.

Selon l'analyse globale de mes relevés d'observations, la proportion de pontes sur figues déjà infestées serait de 15 % (1 figue sur 6). Mais quelques semaines après la campagne d'observation des pontes de 2020, je me suis rendu compte d'une confusion dans mes observations. J'avais considéré des figues au sommet rougi par le soleil comme étant des figues au sommet rougi  par suite d'une attaque de Silba adipata McAlpine. Je n'avais pas pensé, lors des détections des pontes multiples, à l'effeuillage important que j'avais pratiqué autour des groupes de figues immatures pour en faciliter l'observation. Ce qui avait  permis une insolation anormalement élevée, entraînant un rougissement léger du haut des figues. Je pense donc que le pourcentage de 15 % ne peut pas être retenu pour le dénombrement exact des cas de pluralité de pontes dans une figue.

Mais cette valeur de 15 % nous fournit l'indication de la valeur plafond du pourcentage réel. Même si cela est moins satisfaisant, on peut retenir que pour une observation directe des femelles pondeuses d'envergure (182 pontes - voir chapitre relatif à la campagne d'observation des pontes), le pourcentage des cas de pluralité de pontes dans une figue est inférieur à 15 %. Ainsi, les observations n'ont pas permis de déterminer dans combien de figues infestées pond en moyenne une femelle au cours d'une séquence de 20 pontes successives sur le même figuier, mais elles nous permettent d'établir que cette moyenne ne dépasse pas 3 figues. Insistons sur le fait que 15 % ne constitue pas un ordre de grandeur, mais une valeur plafond que le pourcentage réel des pontes multiples ne peut pas dépasser.

Ci-après, exemple de figue pourvue d'un voile rougeâtre au sommet dû à l'excès d'insolation, retenue à tort au titre de la pluralité de pontes dans une figue, lors de mes observations des femelles pondeuses.
 

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.

 

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.

Silba adipata McAlpine : ponte (oviposition) dans une figue immature.

 

VALEUR PLAFOND DU POURCENTAGE A RETENIR

L'examen des larves contenues dans la figue nous a conduit à l'estimation d'une valeur plafond de 10 % pour le pourcentage des pontes multiples dans une même figue (voir chapitre). Et l'étude des œufs sous les écailles ostiolaires et dans le canal ostiolaire ne permet pas de déterminer celui-ci (voir chapitre).

Entre les deux valeurs plafonds du taux de pontes multiples dans la même figue dont nous disposons, s'agissant de valeurs maximales que le taux ne peut pas dépasser, il convient de retenir la plus basse, soit celle déduite de l'examen des larves : 10 %.

Cette valeur plafond ne permet pas de déterminer dans combien de figues déjà infestées pond en moyenne une femelle au cours d'une séquence de 20 pontes successives sur le même figuier, mais elles nous permet d'établir que cette moyenne ne dépasse pas 2 figues. Insistons sur le fait que 10 % ne constitue pas un ordre de grandeur du pourcentage réel des pontes multiples, mais la valeur maximale que ne dépasserait pas celui-ci si on parvenait à le connaître.

 

PROBLÉMATIQUE DE LA DETECTION PAR LA MOUCHE DES FIGUES INFESTEES

 

B. I. KATSOYANNOS a étudié en 1981 et 1982 des populations importantes de mouches noires du Figuier dans l'île de Chios (Grèce). Référence : KATSOYANNOS B. I., 1983, Field observations on the biology and behavior of the black fig fly Silba adipata McAlpine (Diptera, Lonchaeidae) and trapping experiments, Zeitschrift für Angewandte Entomologie Vol. 95, Issue 1-5, pp. 471-476.

Selon B. I. KATSOYANNOS, on ne sait pas si Silba adipata McAlpine sait reconnaître les figues non infestées et les sélectionne pour l'oviposition, comme le font plusieurs mouches de la famille des Tephrytidae. Il cite en références pour la famille des Tephrytidae  : Evidence for a marking pheronome deterring repeated oviposition in apple maggot flies, Environ. Entomol. 1, 326-332, PROKOPY R. J., 1972 ; Oviposition deterring, male-arresting, fruit-marking pheromone in Rhagoletis cerasi, Environ. Entomol. 4, 801-807, KATSOYANNOS B. I., 1975 ; Deterrence of repeated oviposition by fruit-marking pheromone in Ceratitis capitata (Diptera, Tephrytidae), J. Chem. Ecol. 4, 55-63, PROKOPY R. J. et al, 1978.

Il indique que, pour sa part, il n'a observé aucun comportement d'exploration du fruit avant l'oviposition ou de marquage du fruit après le dépôt des œufs.

Mes propres observations, telles que rapportées ci-dessus, mettent en évidence l'occurrence en proportion non négligeable de la pluralité de pontes dans une même figue, et indiquent que les pontes multiples dans la figue peuvent être espacées de plusieurs jours. Ces observations ne permettent pas de déterminer si la femelle pondeuse détecte l'infestation de la figue, mais établissent que, si c'est le cas, cela ne l'empêche pas de pondre dans celle-ci ; donc qu'elle ne sélectionne pas pour la ponte les figues non infestées.

L’observation exceptionnelle de B. PEYRE confirme la pluralité de pontes dans la même figue, et fournit une indication supplémentaire sur le fort degré d’indifférence de la femelle pondeuse par rapport à la présence d’œufs d’autres femelles (puisqu’elle accepte la ponte simultanée dans le même ostiole d'une autre femelle). Par ailleurs, l’analyse des nombre et position des œufs sous les écailles ostiolaires d’une figue ayant fait l’objet de pontes multiples montre que les différentes femelles entassent souvent leurs œufs sous la même écaille ostiolaire (voir chapitre relatif à la détermination de la pluralité de pontes dans une même figue par l'observation des œufs).

 

 

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